LA BELGIQUE CONTRE L’UNION EUROPÉENNE?

Con Daniel Berzosa intenté, en su momento, cuando se emitió la sentencia en primera instancia, publicar este artículo en Bélgica, sin ningún éxito.

 DANIEL BERZOSA / TERESA FREIXES /

            Le tribunal de première instance néerlandophone de Bruxelles a récemment rejeté l’exécution du mandat européen d’arrestation et de détention émise par la Cour suprême de l’Espagne (sa plus haute juridiction) contre le citoyen espagnol et européen Lluís Puig Gordi, ce qui constitue une violation de la législation de l’Union européenne, un affront à la justice et à la démocratie espagnoles et une attaque contre la construction de l’Espace européen de liberté, de sécurité et de justice.

 C’est une décision juridiquement insoutenable et politiquement très grave en raison du caractère répétitif de prise décision desdits tribunaux belges.  Non seulement pour le Royaume d’Espagne, mais surtout pour l’Union européenne.

 Un État qui reçoit un mandat d’arrêt européen ne peut pas revoir l’interprétation du tribunal de l’État qui le délivre conformément à son droit procédural car c’est contraire aux principes de reconnaissance mutuelle et de confiance.  Le législateur espagnol a accepté ces principes dans la «loi 3/2003, du 14 mars, sur le mandat européen d’arrestation et de détention avec honnêteté et précision: «L’application du principe de reconnaissance mutuelle détermine qu’une fois que le mandat européen est reçu par l’autorité judiciaire compétente pour son exécution, la procédure s’enclenche pratiquement automatiquement, sans que l’autorité judiciaire qui doit exécuter l’ordonnance procède à un nouvel examen de la demande pour vérifier sa conformité vis-à-vis de son ordre juridique interne».  Par conséquent, ledit principe de reconnaissance mutuelle a été ainsi réglementé dans le fondement de la norme nationale et est appliqué par les juges espagnols avec le même esprit consciencieux et le même respect.

 Outre ce qui précède, qui constitue déjà une violation suffisante de l’ordre juridique actuel, il faut ajouter que la ratio decidendi de l’arrêt sur la question clé se fonde sur une interprétation erronée de l’affaire Claes c. Belgique sur le juge naturel prédéterminé par la loi en ce qui concerne les règles sur les sujets impliqués dans un procès et la compétence pour les intégrer, conformément au droit procédural espagnol.    

 Imaginez qu’un tribunal belge émette un mandat d’arrêt européen à exécuter en Espagne et qu’un tribunal espagnol le rejette car il considère qu’il est juridiquement inapproprié pour le droit procédural belge d’envisager la possibilité de prononcer des décisions «à huis clos» (comme cela s’est produit dans cette affaire), c’est-à-dire sans respect pour la publicité requise par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH). La non-publicité est en effet inacceptable dans le droit procédural espagnol, où les garanties procédurales et le respect de la CEDH sont des exigences fondamentales du système judiciaire. Ces jugements belges devraient peut-être être transférés devant le GRECO afin de voir s’ils s’inscrivent dans une démocratie fondée sur l’État de droit.

Pour revenir à la décision précitée, fondée sur la bévue mentionnée, la chambre belge soutient «légalement» sa décision finale par l’avis d’un groupe de travail du Haut-Commissariat aux droits de l’homme.  En d’autres termes, il transforme l’avis d’un groupe de travail en une source de droit au-delà du droit de l’Union européenne et de ses États membres.  Incroyable, délirant, inacceptable.

Il est également inaccoutumé en Droit que le juge belge n’admette pas la compétence de la Cour suprême espagnole pour réclamer M. Puig au motif que ce tribunal n’est pas compétent pour le poursuivre.  Dans le droit procédural espagnol, lorsque les mêmes actes sont prétendument commis par des personnes ayant l’une un privilège de juridiction qualifiée et l’autre pas, un tel lien les empêche d’être jugés par des organes différents et, selon le Code de procédure pénale (comme pour la dotation d’un jury de crimes analogues), les affaires concernant des parlementaires ayant ce privilège peuvent englober ceux qui, sans l’être, ont participé à un lien factuel à l’exécution du crime.

 Outre cette connexion, la Cour Européenne des Droits de l’Homme juge l’affaire compatible avec les garanties de l’article 6 de la CEDH, qui doit être interprétée comme le droit d’être jugé par un tribunal «établi par la loi», ce qui est bien dans le cas.  De plus, cette Cour se prononce elle-même sur les affaires dans lesquelles les accusés ont un privilège de juridiction, dans lesquelles un lien peut être établi permettant aux personnes sans ledit privilège d’être jugées devant ce tribunal spécifique, à condition que cela soit «établi par la loi» (Affaire Coëme et autres c. Belgique, §§ 107-108, où la Belgique a été condamnée pour avoir revendiqué un lien qui n’était pas légalement prévu).

Dès lors, pour que cela soit bien clair pour tout lecteur et, si possible, pour les législateurs du Parlement européen, maintenant qu’il semble que ceux-ci se préparent à réexaminer l’ordonnance européenne :

 a) La juridiction d’un État membre ne peut pas contrôler l’application des règles de compétence d’un autre État membre.

 b) En l’état, le tribunal belge a encore moins de compétence pour se prononcer sur le lien entre l’individu réclamé par la Cour suprême espagnole et les autres défendeurs, mesuré précisément devant cette Haute Cour.

 c) La décision du tribunal belge est arbitraire et, par conséquent, contraire à la loi, car elle ne dispose d’aucune base jurisprudentielle légale ou européenne.  Elle devrait donc être révoquée.  Rappelons que le parquet belge a lui-même fait appel.

 Cette résolution, en revanche, semble révéler un problème structurel de la justice belge; où vous ne pouvez pas choisir la langue de la procédure, mais, à Bruxelles, vous pouvez choisir si le tribunal sera néerlandophone ou francophone.  Le choix répétitif de tribunaux néerlandophones par des personnes qui ne semblent pas y avoir d’ «expertise» en néerlandais, et qui se débrouillent assez bien en français, pourrait entraîner quelques «soupçons». Il serait préférable que ces «soupçons» n’existent pas.

 Les rebondissements constants de certains tribunaux belges pour protéger les évadés de la justice espagnole qui se disent «prisonniers politiques» ne heurtent pas seulement la décence et l’intelligence de tout juriste mais, ce qui est plus grave et décisif, blessent le Droit et l’Union européenne en particulier; ainsi que le processus d’intégration européenne lui-même.

Avec cette dernière décision, clairement arbitraire, l’ordre européen de détention a été gravement meurtri et le Rubicon des piliers d’une construction honnête d’une Union européenne basée sur la reconnaissance mutuelle, le respect et le respect des systèmes juridiques des États qui le composent, a été franchi.

 Cette question n’est plus une question de nuances dans l’application de la loi et est devenue un défi pour l’État de droit social et démocratique, en vigueur en Espagne depuis la Constitution de 1978. L’Espagne, un pays qui – c’est pur ainsi dire ironique – est un des moins condamnés par la Cour Européenne des Droits de l’Homme. Nous sommes convaincus que la Belgique, étant un État de droit intégré dans l’UE, la première décision sera sans aucun doute corrigée par la cour d’appel.

 Les pro-européens, les gouvernements des États particulièrement impliqués dans la construction et les institutions européennes devraient également s’exprimer; car ce qui est en jeu n’est pas seulement un espace judiciaire commun, mais aussi la construction de l’Union européenne elle-même.

Daniel Berzosa est professeur de Droit constitutionnel et avocat.

Teresa Freixes est professeur ad personam Jean Monnet et vice-présidente de l’Académie Royale Européenne des Docteurs


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